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Génération précaire : « Le service civique détruit des emplois salariés »

Perspective communiste

Le collectif Génération précaire est connu pour son engagement dans l’insertion professionnelle des jeunes. Explications avec un membre, rencontré par lesechos.fr, du collectif dont les militants souhaitent rester anonymes

L’une des annonces phares de début d’année de François Hollande est la généralisation du service civique avec comme objectif 350.000 jeunes en 2018 ? Pourquoi y êtes-vous opposé ?

Le service civique est un contrat précaire. Il est impossible de vivre avec un peu moins de 600 euros par mois et cela continuera de bénéficier aux mêmes catégories de jeunes (70 % des bénéficiaires du service civique sont diplômés). Ensuite, il crée des dérives dans les associations car il détruit des emplois salariés. Les associations sont en grandes difficultés financières car l’Etat ne cesse de couper les dotations aux collectivités qui sont les principaux bailleurs de fonds des associations. Celles-ci n’ont donc pas vraiment le choix de recourir à des services civiques qui ne leur coûtent presque rien, la plus grande part de la rémunération étant assurée par l’Etat , pour remplacer les emplois salariés. Et en souhaitant multiplier par trois le budget dédié au service civique, le gouvernement va simplement créer plus de compétition entre les différents statuts de salariés dans les associations.

Pourtant, du côté des jeunes, le service civique semble plutôt bien vu et le nombre de bénéficiaires est en augmentation constante depuis son lancement en 2010 ?

Evidemment que les jeunes vont vers le service civique, car c’est la seule chose qu’ils trouvent sur le marché. Mais, en réalité, le service civique ne fait que retarder l’entrée des jeunes sur le marché du travail. François Hollande veut dépenser 700 millions d’euros supplémentaires pour ce dispositif alors que la priorité doit aller à l’apprentissage car c’est le seul dispositif qui permet aux jeunes de trouver un job. Or l’apprentissage est quasi-inexistant dans le secteur associatif. Les jeunes vont vers le service civique car ils ne trouvent pas d’emploi et en le généralisant on ne fait que renforcer leur précarisation, soi-disant au nom d’une mission de service public. Comme si les jeunes étaient responsables du désengagement de l’Etat et de la crise civique actuelle. Mais est-ce vraiment à eux d’assumer cette responsabilité ?

Alors pourquoi, selon vous, le gouvernement poursuit dans cette direction ?

Le service civique a été annoncé comme l’une des mesures pouvant résoudre la crise du 13 novembre. Mais ce n’est pas à eux de jouer ce rôle et de vivre avec 600 euros par mois pour faire, peut-être, des missions d’intérêt général. Le gouvernement s’entête car il est déconnecté des réalités du marché du travail et met des moyens au mauvais endroit. Pour François Hollande, il fallait une énième réaction qui soit consensuelle pour la classe politique vieillissante : les jeunes doivent faire un service civique. Non pas parce que c’est une mesure intelligente , ni parce qu’elle est efficace pour réduire le chômage, mais parce qu’elle est consensuelle. D’autant que les volontaires en service civique ne sont pas comptabilisés dans les chômeurs de catégorie A mais dans ceux de catégorie D. Le généraliser, c’est aussi une bonne façon de faire baisser artificiellement le chômage.

http://www.lesechos.fr/economie-france/social/021617039309-le-service-civique-detruit-des-emplois-salaries-1192272.php?2be8Y1iHbxMPBPww.99


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